Investir dans la nature : transformer les industries plutôt que d’échanger des crédits

Marc Palahi - Chief Nature Officer
Marc Palahi
Chief Nature Officer

Cet article a été initialement publié dans POLITICO le 4 novembre 2024 sous le titre : « Rencontrez l’expert en foresterie qui entend sensibiliser les investisseurs à l’importance de la nature. »

Changer le système financier de l’intérieur. C’est la mission que s’est fixée Marc Palahí, expert en foresterie devenu conseiller en finance durable.

Après avoir passé 16 ans à l’Institut européen de la forêt à alerter les décideurs de l’Union européenne sur les conséquences du changement climatique, M. Palahí a conclu que le système économique ne s’adaptait pas assez rapidement et que les investisseurs devaient commencer à inscrire la nature dans leurs bilans.

C’est pour cette raison qu’il a accepté l’an dernier un poste chez Lombard Odier Investment Managers (LOIM) en tant que premier Chief Nature Officer de l’entreprise. Sa mission : y superviser l’approche de la gestion d’actifs en matière d’investissements liés à la nature, aider les entreprises à réduire leur impact négatif sur la biodiversité et expliquer aux clients de quelle manière leurs activités dépendent de l’environnement naturel. En fin de compte, il s’agit de faire de la nature « un actif essentiel », explique-t-il.

« Notre économie est aujourd’hui extractive, basée sur les énergies fossiles et se développe au détriment de la nature et du climat », a déclaré M. Palahí lors d’un entretien avec POLITICO. « Au cours des 20 prochaines années, nous devrons transformer entièrement et de manière «holistiquement» l’économie pour qu’elle devienne régénératrice, fondée sur la nature, mais prospérant en harmonie avec celle-ci. » Il a noté que les chaînes d’approvisionnement de la plupart des industries devront être radicalement transformées, y compris « l’alimentation, la mode et les produits chimiques ».

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Malgré les mises en garde alarmantes ces dernières années sur la dépendance de l’économie mondiale envers des écosystèmes sains, le rythme du changement est « très lent », a déclaré M. Palahí. « Les gens sont paralysés parce qu’ils voient l’ampleur du problème... et qu’ils éprouvent des difficultés à traduire cela en termes pratiques pour leur entreprise. »

Une grande partie de son travail chez LOIM consiste donc à convaincre les investisseurs et les financiers d’investir dans la transformation des chaînes d’approvisionnement des entreprises afin de placer la conservation de la nature au centre des préoccupations. « La nature a besoin d’une approche à long terme, et le problème est que notre économie fonctionne sur une base mensuelle, trimestrielle », explique-t-il. « C’est frustrant. »

Sa mission consiste à débloquer des capitaux pour inciter les agriculteurs à privilégier les pratiques agroécologiques dans la production de café en Amérique latine, pour amener les marques de mode à abandonner les fibres synthétiques ou pour remplacer le ciment et l’acier par le bois dans le secteur de la construction.

M. Palahí considère que son travail consiste à « traduire en termes économiques tous les avantages » que procure la nature, comme la pureté de l’air et de l’eau, la pollinisation des cultures et la lutte contre les nuisibles. « Parce que les abeilles n’envoient pas de factures, les gens pensent qu’elles ne sont pas là, mais ... elles font un travail extraordinaire, et sans elles, on ne pourrait pas faire pousser un grand nombre de nos cultures ». C’est pourquoi leur contribution économique devrait être évaluée et figurer dans les bilans des entreprises, a fait valoir M. Palahí.


Il souhaiterait également que davantage de scientifiques franchissent le seuil des sociétés d’investissement et des conseils d’administration des entreprises, car il estime que leur connaissance de l’environnement naturel est essentielle pour accélérer la transformation des entreprises.

Prenant l’exemple du secteur financier, il a déclaré que ce dernier devrait s’inspirer de la nature et « être comme les pollinisateurs ... connecter les fleurs qui ont du pollen avec celles qui en ont besoin pour se fortifier ... apporter des capitaux là où ils sont nécessaires pour créer de la valeur et non pas pour l’extraire ».

Il a toutefois signifié qu’il restait sceptique quant aux nouveaux instruments d’investissement tels que les crédits biodiversité et qu’il craignait que ce nouveau marché ne devienne un « Far West » s’il n’est pas correctement réglementé et soumis à des normes « fiables et scientifiquement prouvées ».

En septembre, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé qu’elle souhaitait créer « un marché pour restaurer notre planète » en lançant des crédits nature.

Toutefois, Marc Palahí, qui est également CEO de la Circular Bioeconomy Alliance, fondée par le roi Charles III en 2020, a prévenu que ces nouveaux crédits biodiversité ne devraient pas détourner l’attention de la refonte fondamentale attendue de notre système économique actuel.

« Les gens pensent qu’avec des crédits carbone ou des crédits nature, on résoudra le problème d’une économie destructrice de la nature, mais on n’y parviendra pas uniquement avec un crédit, c’est certain. »

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