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Saisir les « anges déchus », éviter les titres en chute libre

Saisir les « anges déchus », éviter les titres en chute libre
Ashton Parker - Head of Credit Research

Ashton Parker

Head of Credit Research

Les points à retenir :

•    Les « anges déchus » – des obligations dont la note a été abaissée de « investment grade » à « haut rendement » – sont susceptibles d’offrir aux investisseurs des opportunités attractives du fait de la baisse des cours.
•    Mais investir dans des « anges déchus » comporte aussi le risque que les obligations deviennent des « titres en chute libre », dont la qualité de crédit continue à baisser, tout comme leur cours.
•    Notre stratégie applique une analyse de crédit bottom-up rigoureuse afin d’éviter les « titres en chute libre » et de n’investir que dans les « anges déchus », des valeurs qui devraient bénéficier du rétablissement de la note de crédit et d’une inversion des pressions sur les prix. Nous illustrons notre approche par des exemples d’« anges déchus » que sont Ford et Seagate ainsi que, pour ce qui est des « titres en chute libre », de Washington Prime1.

 

Investir dans les « anges déchus » permet aux investisseurs de saisir les opportunités de rendement générées par la rétrogradation de ces obligations de « investment grade » à « haut rendement ». Les cours baissent à cause des ventes forcées qui, ces 16 dernières années, ont généralement entraîné une grave sous-évaluation des « anges déchus » comparativement aux titres de la même tranche dans la poche BB, avec des rendements ajustés du risque toujours meilleurs par rapport à d’autres segments du crédit d’entreprise2.

Cela étant, investir dans les « anges déchus » présente des dangers qui impliquent une approche active de l’analyse de crédit. Les « titres en chute libre » sont des « anges déchus » dont la dégradation de la qualité de crédit (et du prix) se poursuit, pour éventuellement aboutir à la tranche de notation « défaillance ». Une analyse bottom-up rigoureuse est donc nécessaire.

Comment notre stratégie saisit-elle les « anges déchus » appropriés tout en évitant les « titres en chute libre » ? Nous présentons des exemples illustrant de quelle manière notre analyse de crédit bottom-up fait la distinction entre les deux. Notre approche active vise à investir dans les « anges déchus » dont la situation financière s’est dégradée mais dont le profil d’activité semble malgré tout sain. Concrètement, cela signifie que les bons « anges déchus » pourront bénéficier d’un rétablissement de leur notation et d’une inversion des pressions sur les prix, contrairement aux titres en chute libre, qui risquent pour leur part de subir de nouvelles rétrogradations et une pression baissière sur les prix. 

 

Evaluer les profils financiers et d’activité

Notre analyse de crédit implique un examen approfondi des éléments suivants :

  • Le profil financier de l’emprunteur : A quel point la génération de cash-flow de votre entreprise est-elle solide et stable ? Dans quelle mesure peut-elle rembourser ses dettes (d’après les indicateurs de levier3 comme les ratios dette/EBITDA et de couverture des intérêts) ? Quelle est la rentabilité de la société ? Quelle est la politique financière ? Cible-t-elle des indicateurs financiers spécifiques ?
    Les sociétés sont généralement dégradées à la catégorie « haut rendement » parce que leur profil financier est devenu trop prononcé pour mériter une notation « investment grade ». Mais le profil financier d’une entreprise est souvent basé sur le rendement historique plutôt que sur des mesures prospectives. C’est pourquoi il est essentiel de regarder le modèle d’affaires de la société.
  • Le profil d’activité de l’emprunteur : Quels sont les risques pour les activités de la société ? A quel point le secteur est-il attractif ? Comment la société est-elle positionnée sur le secteur ? A cet égard, nous prenons en compte la stratégie de la société, ainsi que ses ressources techniques et son équipe de direction : a-t-elle fait ses preuves en matière d’atteinte de ses objectifs ou d’intégration d’autres sociétés ? Comment adapte-t-elle son modèle d’affaires aux nouvelles dynamiques du marché, comme la sobriété en carbone, les évolutions de la concurrence ou la technologie ?
    Ce niveau d’analyse nous permet de déterminer si le modèle d’affaires de la société lui permettra de prospérer à l’avenir et, éventuellement, d’améliorer sa situation financière pour rétablir sa notation.
 

L’analyse en action

Voyons cette analyse de crédit en action au travers des cas pratiques4 de Ford, Seagate et Washington Prime5.

 

« Titres en chute libre » : Washington Prime

Washington Prime Group est une fiducie de placement immobilier axée sur les centres commerciaux de taille intermédiaire structurellement en difficulté aux Etats-Unis. La note de la société a été abaissée à BB en octobre 2019. Sa performance financière n’a ensuite pas cessé de se détériorer, pour aboutir à d’autres rétrogradations et à la défaillance de la société en mars 2021.

Notre analyse nous a conduit à liquider notre position en décembre 20196, après avoir conclu que le modèle d’affaires de la société était compromis et que ses revenus affichaient une baisse fondamentale. D’une part, les clients se sont de plus en plus tournés vers les achats en ligne, minant la demande d’espace de vente. D’autre part, l’expérience d’achats en boutique s’est de plus en plus reportée sur les centres commerciaux de premier ordre, alors que Washington Prime est spécialisée dans les centres secondaires. Le modèle d’affaires de la société s’est donc heurté à une raréfaction des clients, qui a entamé la performance opérationnelle de son portefeuille de centres commerciaux. Par ailleurs, la société ne disposait pas des ressources nécessaires pour résister à de nouveaux chocs et a pâti de son fort effet de levier.

Le graphique 1 illustre la rapidité à laquelle le cours d’une obligation peut chuter face à de tels défis et à quel point une analyse bottom up soigneuse permet de prévenir l’exposition à de tels risques.

 

Graphique 1. Obligation Washington Prime 5,95% à échéance en août 2024 (prix) 

Sources : Bloomberg. A titre indicatif. La performance passée n’offre aucune garantie quant aux résultats futurs.

« Ange déchu » : Ford 

Ford Motor, l’un des constructeurs automobiles les plus anciens et les plus réputés au monde, a vu sa note abaissée à « haut rendement » au plus fort de la crise du Covid-19 en mars 2020.7 La rétrogradation est intervenue au cours du mois qui a vu le plus grand nombre d’« anges déchus » et a coïncidé avec des flux sortants extrêmes. Les écarts obligataires ont dépassé l’univers BB moyen de plus de 500 points de base.

Le titre a, toutefois, connu un fort revirement peu après. La reprise initiale était liée aux liquidités, les prix dépendant des actions de la Réserve fédérale américaine (Fed). La reprise plus régulière de Ford a ensuite montré une tendance à long terme à l’inversion des réactions excessives ainsi que le solide profil d’activité de l’entreprise.

La rétrogradation a reflété les défis opérationnels et commerciaux de Ford, à l’heure où elle entreprenait un vaste plan de restructuration et où le cash-flow et la rentabilité étaient faibles. Mais malgré la détérioration des mesures financières de la société, elle est restée un acteur important d’un marché sur lequel la demande de voitures s’est maintenue. Son profil d’activité montrait donc des signes positifs. 

A titre d’exemple, la société est un fabricant à grande échelle solidement ancré sur le rentable segment des camions ; elle exécute son plan de revalorisation des marges et fait évoluer sa transmission. Elle a, par ailleurs, investi dans le développement de véhicules électriques. Notre analyse a montré une solide performance du crédit, une gestion des risques prudente et une vaste structure du capital dans son activité financière captive. Nous avons établi que Ford possédait la solidité et l’assise pour faire face aux défis posés par le Covid-19, la pandémie ayant mis la demande de véhicules en suspens, mais ne l’ayant pas supprimée. Si la société se heurte aux mêmes problèmes d’approvisionnement que le reste du secteur, ni elle ni le secteur ne montrent de signe de déclin structurel. 

Cette analyse nous a conduit à conclure que le modèle d’affaires de la société n’est pas dépassé - surtout qu’elle s’était déjà rétablie de l’abaissement de sa note de « investment grade » à « haut rendement » en 2005 – et qu’elle est moins susceptible de subir de nouvelles fortes baisses de son cours.

 

Graphique 2. Obligation Ford 3,664% à échéance le 09.05.2024 (prix)

Sources : Bloomberg. A titre indicatif. La performance passée n’offre aucune garantie quant aux résultats futurs.

 

« Ange déchu » : Seagate

La société de stockage de données américaine Seagate Technology a émis USD 1 milliard d’obligations pour financer des rachats d’actions fin 2020, ce qui a entraîné l’abaissement de sa notation à BB. La société a décidé de verser un dividende aux actionnaires, préférant les détenteurs d’actions aux créanciers obligataires, et a choisi d’affaiblir ses indicateurs financiers au passage. 

Notre analyse portait principalement sur le choix opéré par la société de verser un dividende plutôt que de subir des forces extérieures. Ce choix actif ne signifie pas que Seagate subira d’autres rétrogradations, notamment parce que nous avons établi que la société était parfaitement à même de financer ses activités à l’avenir. Malgré des tendances séculaires à la baisse sur les marchés traditionnels des lecteurs de disque dur et la cyclicité (inexorable) du secteur, notre analyse a établi que la société avait amplement fait ses preuves en termes de génération d’un cash-flow libre robuste. Nous avons donc statué qu’il s’agit d’un titre de grande qualité coté BB élevé, doté d’un effet de levier brut de l’ordre de 2x à 3x et d’importantes liquidités.

 

Graphique 3. Obligation Seagate 4,125% à échéance en janvier 2031 (prix)

Sources : Bloomberg. A titre indicatif. La performance passée n’offre aucune garantie quant aux résultats futurs.

 

Saisir les « anges déchus » implique d’éviter les « titres en chute libre ». Une analyse de crédit soigneuse des perspectives commerciales de l’emprunteur permet de différencier les deux, pour garantir de n’investir que dans les noms offrant des perspectives de rétablissement attractives. 

Pour lire le whitepaper relatif à notre stratégie des « anges déchus », veuillez cliquer sur le bouton de téléchargement.

Sources

1 Toute référence à une entreprise ou à un titre spécifique ne constitue en aucun cas une recommandation d’achat, de vente, de participation ou d’investissement direct dans l’entreprise ou le titre concerné(e). Rien ne garantit que les recommandations faites à l’avenir donneront des résultats positifs ou qu’elles permettront d’égaler la performance des titres cités dans le présent document.
2 La performance passée n’offre aucune garantie quant aux rendements futurs.
3 Pour l’entreprise, l’effet de levier mesure l’emprunt par rapport au résultat. L’effet de levier d’une entreprise mesure habituellement le ratio de sa dette par rapport à ses résultats (par exemple, l’EBITDA). 
4 Les cas pratiques présentés dans ce document sont donnés à titre indicatif uniquement et ne sont pas des recommandations d’investissement dans les titres mentionnées ni une énumération complète de tous les facteurs ou considérations potentiellement pertinents pour un investissement dans ceux-ci. Les cas pratiques ont été sélectionnés pour illustrer le résultat du processus d’investissement suivi par le gérant pour un certain type d’investissement mais ne sauraient refléter le portefeuille complet passé ou futur de la stratégie. Il convient de considérer que ces informations ne donnent pas, à elles seules, une vision claire et objective du processus d’investissement du gérant ni de la composition du portefeuille de la stratégie.
5 Toute référence à une société ou à un fonds spécifique ne constitue pas une recommandation d’achat, de vente, de détention ou d’investissement directement dans ladite société ou ledit fonds. Rien ne garantit que les recommandations qui seront exprimées à l’avenir seront rentables ou correspondront à la performance des fonds évoqués dans le présent document. 
6 Ce cas pratique d’illustration renvoie à un exemple historique et à une analyse réalisée pour une autre stratégie. La stratégie Fallen Angels Recovery a été lancée le 30 novembre 2021.
7 C’est la deuxième incursion de Ford parmi les « anges déchus », après l’abaissement de sa notation « investment grade » en 2005.

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