investment viewpoints
L’impact croissant de l’univers obligataire




Nous célébrons le premier anniversaire de LO Funds-Global Climate Bond, une initiative commune entre Lombard Odier Investment Managers (LOIM) et Affirmative Investment Management (AIM). Nos experts répondent à des questions sur le marché en plein essor des obligations vertes (green bonds) et ce à quoi les investisseurs peuvent s’attendre dans un futur proche.
Quelle a été l’évolution du marché des obligations vertes en 2017 ?
Le marché a continué à croître rapidement avec une diversification plus importante des émetteurs.
Les nouvelles émissions d’obligations vertes labellisées se sont élevées à USD 155 milliards en 2017, soit une augmentation de 78 % par rapport à l’année précédente. Sur les 239 émetteurs issus de 37 pays, 61 % étaient nouveaux.1
Les obligations vertes souveraines ont fait une entrée remarquée en 2017. La France a lancé la plus grande émission d’obligations vertes (USD 10,7 milliards), imitée par la Pologne, Fidji, la Belgique et d’autres pays. Le Nigeria a été le premier pays d’Afrique à émettre des obligations vertes en décembre 2017. En février 2018, l’Indonésie (l’un des premiers pays exportateurs de charbon), a été le précurseur en Asie en procédant à l’émission d’une obligation verte islamique (sukuk)2 pour USD 1,25 milliard.
Les obligations garanties par l'État, la dette des collectivités locales et des marchés émergents, les obligations d’entreprise et les ABS ont tous connu une croissance importante.3 Le Canton de Genève, par exemple, a lancé une émission destinée à financer un projet de bâtiments à haute performance énergétique dans le secteur de la recherche médicale. HSBC a lancé les premières obligations assorties d'un objectif de développement durable alignée sur les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies. ANZ, autre établissement financier, a depuis émis sa propre obligation ODD. Nous tablons sur une accélération de ce segment du marché dans un avenir proche.
Quels problèmes pose la croissance du marché des obligations vertes aux investisseurs ?
Nous nous félicitons de l'arrivée de nouvelles opportunités pour abaisser la courbe du crédit et nous sommes convaincus que le marché a la capacité d’absorber une croissance mondiale soutenue. En revanche, dans la bataille pour accéder à des émissions primaires sur-souscrites, nous recommandons aux investisseurs de rester sélectifs sur la qualité du crédit et de se méfier du risque d’écoblanchiment ou greenwashing.4
Par exemple, la Chine, pourtant l’un des principaux émetteurs de carbone,5 est aussi leader en matière d’obligations vertes, un signe encourageant pour le développement des énergies propres. On peut toutefois s’inquiéter de l’utilisation du produit de certaines émissions dites vertes pour financer des projets de « charbon propre ». De même, on relève un manque de transparence préoccupant au niveau du suivi de l’allocation des capitaux. Cela souligne la nécessité d’élaborer un cadre normatif harmonisé et d’établir un processus rigoureux de vérification d'impact par les investisseurs.
La Loan Market Association, en collaboration avec la Asia Pacific Loan Market Association, a publié récemment les Green Loan Principles avec le soutien de l'International Capital Market Association, qui s’inspirent clairement des Green Bond Principles. La Société financière internationale, une organisation du Groupe de la Banque Mondiale, continue d'apporter une aide technique constante aux entreprises du secteur privé dans les pays en développement et fournit des données sur les projets. L'ensemble de ces actions devraient contribuer à l’élaboration de normes internationales énonçant les critères d’éligibilité des obligations au label « green bond ».
La multitude de documentation et de nomenclature rend difficile la comparaison entre les différentes obligations vertes. AIM utilise un cadre exclusif développé en interne pour analyser chaque émission individuellement. Cette méthode cohérente évite la profusion de normes et d'indices qui peut prêter à confusion sur le marché des obligations vertes.
Lo Funds–Global Climate Bond a récemment remporté le prix du « green bond fund of the year 2018 » organisé par environmental finance.6 quelles sont, selon vous, les clés de la gestion d'une stratégie d’obligations climatiques performante ?
La vérification d'impact indépendante est l’élément crucial de notre stratégie. Elle nous permet d’étendre notre univers d'investissement d’obligations vertes labellisées au marché plus large des obligations climatiques qui pèse environ USD 900 milliards.7 La force du partenariat entre LOIM et AIM ne tient pas uniquement au fait que notre sélection ne se cantonne pas aux titres d'un indice d’obligations vertes labellisées prédéfini. Nous ajoutons cette couche essentielle de vérification et de suivi indépendants. De notre point de vue, ce processus, qui renforce l’engagement de l’émetteur, rend l’analyse crédit d’autant plus rigoureuse car il garantit notre absence de concession tant sur la qualité de l'investissement que sur les critères d'impact.
Par ailleurs, l’expérience et la capacité de recherche de l’équipe de gestion de portefeuille sont fondamentales.
Enfin, dans l'univers des obligations vertes, la facilité d’accès aux émetteurs est décisive. Les émetteurs prennent parfois directement contact avec nous, en amont de l’émission. Selon nous, une discussion privée préalable avec les émetteurs à propos de l'affectation du produit de leur émission, en plus de limiter le risque de greenwashing,8 donne aux investisseurs un avantage en termes d'information qui renforce l’analyse crédit et la sélection. Quant à l’émetteur, il peut mettre nos commentaires à profit pour parfaire sa gouvernance interne, accroître sa transparence et améliorer le résultat de son projet, rehaussant ainsi son profil de crédit global.
Il est intéressant de noter que les porteurs d’obligations classiques reconnaissent les avantages d'un contact systématique avec les émetteurs sous la forme d’un dialogue actif, que ce soit pour justifier une décision de placement ou pour influencer l’utilisation du produit de l’émission. Cette particularité, qui était jusqu’à présent l'apanage de l’investissement en obligations vertes, ouvre la voie à une mobilisation croissante des porteurs d’obligations.
Quel est le moteur de la croissance de ce marché ?
La réglementation est un moteur essentiel. La France est pionnière dans ce domaine, notamment avec le vote de la loi relative à la transition énergétique (article 173) qui impose aux investisseurs institutionnels d'indiquer, dans leur rapport annuel, des informations concernant l'impact sur le climat de leurs investissements.
On observe également le développement d'une « auto-réglementation » qui va du groupe de travail sur les informations financières relatives au climat du Conseil de stabilité financière à des initiatives civiles telles que le Social Stock Exchange et le Carbon Disclosure Project au Royaume-Uni, ainsi que SDG Investments et Climate Action 100+ aux Pays-Bas. Les sociétés d’assurance pourraient être incitées à choisir les obligations vertes en vertu des exigences en matière de fonds propres prévues par la directive Solvabilité II. À l’avenir, nous sommes persuadés que les responsables politiques orienteront les investisseurs vers des investissements responsables par le biais de réglementations contraignantes mais également à grand renfort de recommandations.
La Commission européenne a dévoilé récemment sa proposition sur la finance durable, qui comprend une classification européenne des obligations vertes, une initiative que nous applaudissons. Nous accordons une grande importance à l’utilisation de notre cadre exclusif et de nos capacités de reporting d’impact régulier et détaillé, que les investisseurs apprécient dans la mesure où cela leur permet d’y voir plus clair dans ce marché hétérogène.
On assiste enfin à une prise de conscience sociale croissante de la part des investisseurs.
Quel avenir pour les obligations vertes ?
Le marché des obligations vertes a connu une croissance rapide et régulière ces dernières années. Selon les projections de Moody’s Investors Service, les émissions d’obligations vertes atteindront USD 250 milliards en 2018 et le volume des émissions devrait, selon nous, continuer d’augmenter au cours des prochaines années.
L'une des caractéristiques sera la diversification accrue des types d’émetteurs et de leur notation, ainsi qu’une offre plus importante sur l’ensemble des échéances. Les types d’obligations vertes se sont multipliés sur le marché : obligations garanties, émissions titrisées, titres hybrides et obligations islamiques (sukuk), ce qui reflète la réponse des émetteurs à une demande de plus en plus diversifiée. La sensibilisation progressive à la finance climatique et l’impact du changement climatique sur les économies et les entreprises vont sans nul doute apporter leur soutien à la croissance.
Nous prévoyons également que les entreprises s’adapteront en conséquence et adopteront des pratiques durables pour rester concurrentielles à moyen terme. Ainsi, Danone10 a lancé une obligation sociale pour EUR 300 millions en mars 2018 suite à l'intégration de critères ESG dans son prêt syndiqué de EUR 2 milliards, destiné à financer des projets d’agriculture responsable et de nutrition médicale. Nous considérons les obligations sociales9 comme le prolongement naturel des principes des obligations vertes. L’essor de ce segment du marché devrait encourager davantage de sociétés privées, plus particulièrement celles affichant une bonne santé de leur bilan, à s'atteler aux questions sociales.
Compte tenu du nombre d’initiatives gouvernementales visant à favoriser le développement du marché des obligations vertes dans le monde, nous pensons que la diversité des participants, des notations et des devises continuera à croître rapidement, soutenue par l’accélération des programmes politiques de protection de l’environnement à travers le monde. À notre avis, étant donné l’ampleur et la profondeur du marché actuellement, les investisseurs ont la possibilité de mettre en place une stratégie de crédit bien diversifiée, d'une qualité équivalente, si ce n’est supérieure, à celle du marché obligataire classique.
Selon nous, les obligations vertes ne constituent plus une tendance de niche au sein des portefeuilles des investisseurs, mais un courant fermement établi au sein de l'univers de placement obligataire, qui se double d'une réelle capacité d'impact.
1 Source : Climate Bonds Initiative, janvier 2018.
2 Toute référence à une société ou à un titre spécifique ne constitue pas une recommandation en vue d’acheter, de vendre, de détenir ou d’investir directement dans la société ou les titres. Rien ne garantit que les recommandations qui seront exprimées dans le futur seront profitables ou correspondront à la performance des titres évoqués dans ce document.
3 « Asset-Backed Securities » (le marché des obligations vertes labellisées doit sa croissance principalement aux titres adossés à des crédits hypothécaires américains garantis par des bâtiments à faible consommation énergétique certifiés ou aux financements garantis destinés à des projets d'amélioration de l'efficacité de la consommation en eau et énergie dans des logements et autres bâtiments.)
4 L'écoblanchiment ou greenwashing fait référence à la pratique consistant à vanter les qualités environnementales d’une obligation verte par des affirmations mensongères ou infondées.
5 Source : International Energy Agency, estimations de 2015, novembre 2017.
6 Les performances passées ne constituent pas un indicateur fiable de performance future.
7 Source : Climate Bonds Initiative, juin 2017.
8 L’écoblanchiment ou greenwashing fait référence à la pratique consistant à vanter les qualités environnementales d’une obligation verte par des affirmations mensongères ou infondées.
9 Les obligations sociales sont destinées à financer des projets dans l’optique de résultats précis au niveau social, notamment en termes d’éducation, de formation et d’emploi.
10 Toute référence à une société ou à un titre spécifique ne constitue pas une recommandation en vue d’acheter, de vendre, de détenir ou d’investir directement dans la société ou les titres. Rien ne garantit que les recommandations qui seront exprimées dans le futur seront profitables ou correspondront à la performance des titres évoqués dans ce document.
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