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Obligataire : leçons à tirer des précédents cycles de hausse des taux

Obligataire : leçons à tirer des précédents cycles de hausse des taux
Philipp Burckhardt, CFA - Fixed Income Strategist and Portfolio Manager

Philipp Burckhardt, CFA

Fixed Income Strategist and Portfolio Manager
Jamie Salt, CFA - Systematic Fixed Income Analyst and Portfolio Manager

Jamie Salt, CFA

Systematic Fixed Income Analyst and Portfolio Manager

 

Les points à retenir

  • Nous avons analysé les données historiques afin d’identifier la réaction que les marchés tendent à avoir durant un cycle de hausse des taux, en nous concentrant sur les emprunts d’Etat et sur les crédits d’entreprises. 

  • L’impact des hausses de taux sur les emprunts d’Etat exposés à la duration semble évident, mais quelques nuances intéressantes se dessinent s’agissant de la forme de la courbe de rendement, des spreads et de la volatilité.

  • Nos recherches suggèrent que les premières phases de ces cycles peuvent favoriser la performance des crédits.  

 

Un environnement en transition

Compte tenu de pressions inflationnistes significatives et persistantes, les récentes communications de la Réserve fédérale américaine (Fed) ont souligné la nécessité de s’éloigner de la politique monétaire actuellement ultra-accommodante. Pour les investisseurs, cela a laissé entendre un changement des conditions de taux, la Fed envisageant d’entamer un cycle de hausse. Les marchés tablent actuellement sur des hausses d’environ 125 pb en 20221, en plus de spéculations de réduction du bilan de la Fed. Les actifs risqués ont produit de très bonnes performances depuis le pic de la pandémie. La dernière phase du cycle approchant, la question est de savoir si cette solide performance peut encore durer.

Dans ces recherches, nous évaluons comment les marchés ont réagi aux hausses de taux par le passé, à l’aide de 75 ans de données sur les Etats-Unis. Nous divisons la période d’observation en conditions de « hausse », « baisse » et « maintien », sur 15 cycles de hausse (figure 1). Notre analyse se concentre sur les deux composantes des rendements obligataires : les variations des taux d’intérêt (duration) et les variations des spreads de crédit. Bien que chaque cycle soit différent et que notre analyse ne soit pas une science exacte, les résultats sont utiles pour l’allocation des actifs obligataires.

 

Figure 1 : Cycles de taux de la Réserve fédérale américaine depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale (1946-2021)Credit spreads vs rate hikes-Chart1_FR-01.svg

Sources : Bloomberg, Global Financial Database, Réserve fédérale de Saint-Louis et calculs LOIM. Les données sont mensuelles. Les cycles de hausse/baisse commencent à la fin du mois de la première hausse.

 

Performance des taux d’intérêt

L’impact de la hausse des taux d’intérêt sur les emprunts d’Etat exposés à la duration semble évident, mais des nuances intéressantes se dessinent.

Intuitivement, il semble logique de penser que la hausse des taux provoque des hausses sur l’ensemble de la courbe de rendement, en ligne avec les taux à court terme, et que tous les segments de duration connaissent des difficultés en période de hausse des taux. Effectivement, la figure 2A montre que le rendement des titres à dix ans tend à augmenter de 84 pb en moyenne sur les douze premiers mois de ces périodes, ce qui se traduit par des performances absolues négatives pour les emprunts d’Etat. Toutefois, la figure 2B montre que la volatilité du rendement des titres à dix ans est en général moins importante en période de hausse des taux que dans tout autre régime de la Fed. Cela s’explique probablement par le fait que, en règle générale, les hausses de taux suivent une trajectoire plus harmonieuse et se font sur des périodes plus longues que les baisses, et sont donc plus prévisibles. Par ailleurs, ces cycles sont habituellement anticipés bien avant la première hausse, tandis que les catalyseurs des baisses, tels que les chocs externes, surviennent souvent sans prévenir. La suppression des incertitudes réduit la probabilité de correction significative, ce qui amoindrit la volatilité.

 

Figure 2 : Comportement du rendement des titres à dix ans dans les différents régimes de la Fed (1945-2022)

Credit spreads vs rate hikes-Chart2_FR-01.svg

Sources : Bloomberg, Global Financial Database, Réserve fédérale de Saint-Louis et calculs LOIM. Les données sont mensuelles. Le cycle de hausse des taux commence le mois 0. Les cycles de hausse sont indiqués à la figure 1. Les chiffres de la volatilité sont annualisés.
 

Toutefois, les segments à plus longue échéance des courbes de rendement sont influencés plus par les perspectives de croissance et moins par les taux à court terme / taux directeurs. Ainsi, toute hausse des taux à court terme, et particulièrement s’ils sont portés à des niveaux supérieurs aux attentes ou au-delà du taux d’intérêt neutre, peut détériorer les perspectives de croissance à plus long terme et faire diminuer les rendements des titres à plus longue échéance. La figure 2A montre que cela ne suffit pas à compenser la hausse des rendements provoquée par la hausse des taux, mais cela a des conséquences importantes sur la forme de la courbe. Lors des précédents cycles de hausse des taux, l’augmentation du rendement des titres à dix ans s’est avérée inférieure à celle du taux à court terme, de sorte que la courbe s’est aplatie, comme on le constate à la figure 32. De plus, contrairement à la volatilité comparativement faible illustrée à la figure 2B, la figure 3B montre une plus grande volatilité lors de l’évolution de la pente de la courbe en période de hausse des taux qu’en période de maintien. Cela pourrait donc permettre aux investisseurs suffisamment flexibles d’exploiter cet aplatissement, grâce à des pondérations tactiques sur certains segments de la courbe.

 

Figure 3 : Evolution de la pente des titres à dix ans / taux à court terme dans les différents régimes de la Fed (1945-2022)Credit spreads vs rate hikes-Chart3_FR-01.svg

Sources : Bloomberg, Global Financial Database, Réserve fédérale de Saint-Louis et calculs LOIM. Les données sont mensuelles. Le cycle de hausse des taux commence le mois 0. Les cycles de hausse sont indiqués à la figure 1. La pente est calculée comme étant la différence entre le rendement des titres à dix ans et le taux directeur (à court terme).

 

Performance des spreads de crédit

La performance des crédits durant les cycles de hausse des taux semble moins intuitive. A première vue, le resserrement des conditions financières qui en résulte est défavorable aux actifs risqués, notamment en raison de la hausse des coûts de refinancement. Toutefois, il convient d’examiner l’état global des marchés au début des cycles de hausse. L’économie sort habituellement d’une phase de forte croissance, soutenue par une politique monétaire accommodante. Les entreprises prudentes ont sans doute profité de ces conditions pour augmenter leurs liquidités ou autres coussins en vue de difficultés futures. En conséquence, les fondamentaux sont généralement solides, tant sur le plan de la croissance macroéconomique que sur le plan des bilans des entreprises, et les défauts sont peu nombreux.

La figure 4 suggère que, s’agissant des spreads de crédit ou des rendements excédentaires, la solidité des fondamentaux l’emporte sur le resserrement des conditions financières, du moins pour commencer. D’ailleurs, la figure 4A montre que, dans tous les cycles de hausse des taux que nous avons analysés sur cette période de 75 ans, les spreads se sont resserrés durant les huit premiers mois. Au-delà de cet horizon, les caractéristiques uniques de chaque cycle engendrent des performances divergentes pour les spreads. Bien que cet horizon de huit mois semble quelque peu arbitraire et doive être interprété avec prudence, il met néanmoins en lumière une tendance empirique régulière couvrant 15 cycles de hausse des taux et une gamme variée de scénarios macroéconomiques.

Il nous est également utile d’observer la volatilité des variations des spreads dans différents régimes. Selon les données historiques, les spreads sont plus volatils lorsque la banque centrale est active que lorsqu’elle maintient les taux. Toutefois, durant les six premiers mois d’un cycle de hausse des taux, la volatilité est en réalité moins élevée que durant les autres périodes. Là aussi, cela s’explique probablement par les conditions fondamentales favorables qui dominent au début. Par la suite, la croissance finit par ralentir et les spreads deviennent plus volatils. Néanmoins, les conclusions que nous pouvons tirer des cycles précédents indiquent que la première phase est favorable à la performance des crédits. 

 

Figure 4 : Variation des spreads de crédit des titres d’entreprises américaines notés BBB dans les différents régimes de la Fed (1945-2022)

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Sources : Bloomberg, Moody’s, Global Financial Database, Réserve fédérale de Saint-Louis et calculs LOIM. Les données sont mensuelles. Le cycle de hausse des taux commence le mois 0. Les cycles de hausse sont indiqués à la figure 1. Les spreads sont ceux des titres d’entreprises américaines notés BBB. Les chiffres de la volatilité sont annualisés. 

 

Implications en matière d’allocation

Aucun cycle de hausse des taux ne ressemble à un autre, chacun a ses propres caractéristiques macroéconomiques et de marché. Nous estimons néanmoins que cette analyse historique peut appuyer les décisions en matière d’allocation, dans tous les segments obligataires.

Une conclusion globale s’impose : les six à douze premiers mois du cycle tendent à favoriser le crédit aux dépens des taux. Nous pensons que cela s’explique par les perspectives de croissance, qui restent solides, et par les bilans, qui permettent aux entreprises d’absorber l’impact du resserrement des conditions financières. Les actifs à duration sont quant à eux censés souffrir de la hausse des taux, mais dans une moindre mesure pour les segments à plus longue échéance. Cela crée des opportunités pour les gérants actifs. Nous soulignons également qu’une allocation permanente aux emprunts d’Etat reste une stratégie prudente. Ces titres présentent d’excellents avantages en termes de liquidité et de diversification en période de tension, et des taux plus élevés confèrent une certaine protection contre les chocs exogènes sur la croissance, comme cela a été le cas en mars 2020 avec la pandémie de Covid-19.

 

Sources

[1] Selon la tarification des contrats à terme sur les fonds fédéraux, fin janvier 2022
[2] Pour de plus amples informations, voir deux de nos articles récents : « Exploiting yield curve dynamics in hiking cycles » et « How adaptability is imperative in 2022 ».
 

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