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Investir dans le «zéro déchet»

Investir dans le « zéro déchet »
Thomas Höhne-Sparborth, PhD - Head of Sustainability Research

Thomas Höhne-Sparborth, PhD

Head of Sustainability Research

Nous vivons aujourd’hui dans une économie qui n’est pas du tout durable au vu des habitudes de consommation et de production ainsi que du style de vie de la population.

Actuellement, nous vivons dans une économie linéaire, basée sur le modèle « prendre-utiliser-jeter », qui repose sur l’exploitation de grandes quantités de ressources naturelles. Ce mode de vie exerce une pression énorme sur le capital naturel, nous empêchant non seulement d’exploiter la capacité régénératrice de la nature, mais faisant également obstacle à la protection de la biodiversité de la nature. Autrement dit, nous passons à côté de nombreuses opportunités, telles que la valeur résiduelle que pourrait apporter la réutilisation des produits finis ou la valeur des composants et des matériaux contenus dans les déchets. Chez Lombard Odier, nous pensons que, dans le cadre de la transition nécessaire vers une économie CLIC™, acronyme anglais des termes Circular (circulaire), Lean (efficient), Inclusive (inclusif) et Clean (propre), l’analyse du défi que présente le « zéro déchet » peut nous aider à identifier les opportunités d’investissement dans de nombreuses industries.

S’il est vrai que de nombreuses industries dépendent de la nature pour survivre, elles montrent aussi une certaine propension à la détruire. Nous devons investir dans un mode de production plus efficient permettant de produire davantage avec moins de ressources tout en identifiant le potentiel inexploité de la bioéconomie circulaire. Aujourd’hui, nos villes et nos industries regorgent de déchets. Chaque année, nous produisons plus de 2 milliards de tonnes de déchets municipaux, soit l’équivalent de plus de 7 500 bâtiments de la taille de l’Empire State Building. Dans certains pays, nous produisons chaque jour jusqu’à 4,5 kg de déchets par personne1. Environ 33 % des déchets que nous produisons sont simplement jetés dans la nature, en dehors des décharges, ce qui contribue à la pollution, aux risques sanitaires et à la perte de biodiversité2. En outre, les émissions de gaz à effet de serre générées lors des processus de décomposition et d’élimination représentent jusqu’à 5 % des émissions mondiales3.

Ces flux de déchets représentent bien entendu un danger pour l’environnement,  mais ils constituent également une opportunité économique et d’investissement manquée.

 

Matériaux et déchets : notre modèle économique nécessite de grandes quantités de matières premières

 

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Source : Estimations et calculs LOIM basés sur les données du CICA, de la Banque mondiale et du rapport Global Resources Outlook

 

Selon les projections actuelles, 160 milliards de tonnes de matériaux seront extraites de la planète d’ici 2040. Seuls 9 % de ces matériaux sont actuellement recyclés, compostés ou traités pour être réutilisés, les 91 % restants contribuent à l’épuisement progressif de nos ressources naturelles.  À l’échelle mondiale, la quantité de déchets devrait donc avoisiner les 3,4 milliards de tonnes à l’horizon 2050, ce qui signifie qu’ils augmentent deux fois plus vite que la croissance démographique. L’augmentation de la quantité de déchets s’explique par l’évolution démographique, par l’augmentation des revenus et par l’évolution des modes de consommation. Les régions responsables de la plus grande partie de l’augmentation prévue, telles que l’Asie du Sud et certaines régions d’Afrique, figurent également parmi les régions où les systèmes de gestion des déchets sont les moins développés, rendant les efforts de réduction des déchets encore plus urgents.

 

Nos habitudes de production ne sont absolument pas durables

Bientôt, nous extrairons l’équivalent du poids du Mont Everest chaque année, mais ne recyclerons que 9 % des matériaux extraits

 

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Source : Estimations et projections LOIM basées sur les données du rapport Global Resources Outlook 2019, du rapport Circularity Gap Report 2019 et de la Commission européenne

 

Une grande partie de ces déchets conserve un potentiel économique important. Un camion à ordures rempli de vêtements est brûlé ou vidé dans une décharge chaque seconde, alors même que la plupart de ces vêtements ont peu été portés avant d’être jetés6. De même, quelque 54 millions de tonnes de déchets électroniques et électriques sont produites chaque année, à peine 17 % d’entre eux sont recyclés7. La valeur des matières premières dans ce flux de déchets non traités dépasse les 63 milliards d’USD et augmente d’année en année8.

 

 

Matériaux et déchets : une opportunité manquée

Le recyclage offre une opportunité environnementale et économique qui remet en question les modèles de production traditionnels

 

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Source : Estimations LOIM, Global e-Sustainability Initiative, Dell, The Verge

 

Alors que les améliorations en matière de gestion des déchets sont souvent considérées comme un coût net, la prise en compte des externalités négatives de la pollution, y compris la tarification du carbone, modifie radicalement l’équation financière de la gestion des déchets. 

 

Opportunités d’investissement à saisir

L’adoption du « zéro déchet » exige que des mesures soient prises à chaque étape de la chaîne de valeur d’un produit. Cela va de la remise en question de notre mode de consommation, en remplaçant les produits par des alternatives ou un service de qualité supérieure, à la limitation de l’utilisation des matières premières et à la prolongation de la durée de vie économique d’un produit, en passant par la mise en place de systèmes de collecte et de recyclage appropriés à la fin du cycle de vie d’un produit. Selon nous, l’adoption du « zéro déchet » offre de multiples possibilités d’investissement à saisir, parmi lesquelles :

 
  • Le commerce électronique et les marketplaces en ligne intègrent la possibilité de revendre des articles, en promouvant la capacité de réutiliser les produits et de prolonger leur durée de vie économique utile. La réutilisation des produits est un élément important dans la hiérarchie des stratégies visant à réduire les déchets et est préférable au recyclage. 

  • Les détaillants de produits dégriffés proposent des produits de saisons précédentes, excédentaires ou d’occasion, généralement à des prix réduits. Dans l’industrie de la mode, connue pour sa forte rotation des stocks et le gaspillage, ces détaillants peuvent augmenter le pourcentage de produits manufacturés qui sont vendus ou revendus.

  • Les services de réparation apparaissent à mesure que les appels en faveur de formes plus modulaires et réparables de produits de consommation ont abouti à la reconnaissance juridique du « droit à la réparation » dans certaines régions, comme dans l’UE. Les services offerts vont de la réparation domestique à des sociétés spécialisées dans la réparation et l’entretien d’équipements industriels ou dans l’entretien d’équipements produits par des fabricants partenaires. 

  • Des garanties de premier ordre sont offertes par certains fournisseurs de produits de consommation destinés à être plus durables. Ces produits à durée de vie plus longue permettent d’associer la marque à des produits de plus grande valeur et de meilleure qualité et s’opposent aux stratégies commerciales fondées sur l’obsolescence programmée et la rotation rapide des biens de consommation. 

  • Les concepts « déchets et recyclage » couvrent les étapes de la collecte, du recyclage et de la valorisation en fin de vie d’un produit pour traiter les déchets, quels qu’ils soient, qui ne peuvent être évités, en ayant recours à des produits plus intelligents ou en les réutilisant et en les réparant. Le recyclage assure une seconde vie économique aux composants individuels ou aux matériaux dont ils sont composés et maximise la valeur ajoutée de ces ressources naturelles.

 

Notre économie doit amorcer la transition vers une économie CLIC™ (circulaire, efficiente, inclusive et propre). L’adoption d’une bioéconomie plus circulaire pourrait dégager des milliers de milliards de valeur inexploitée. Le capital naturel est un bien extraordinairement productif dont nous devons exploiter la puissance et préserver la capacité de régénération. En analysant l’exposition des modèles d’affaires à une économie en transition vers le « zéro déchet », nous pensons pouvoir identifier les entreprises les plus à même de surperformer et de libérer le potentiel de l’économie CLIC™, ainsi que de soutenir les efforts entrepris en faveur d’un monde plus durable. 

 

sources.

Banque mondiale (2017, date présumée). What a Waste 2.0: A global snapshot of solid waste management to 2050. Disponible sous : https://datatopics.worldbank.org/what-a-waste/trends_in_solid_waste_management.html
2 Idem
3 Idem
4 Circle Economy (2019). The Circularity Gap Report: Closing the Circularity Gap in a 9% World. De Wit, M; Verstraeten-Jochemsen, J; Hoogzaad, J and Kubbinga, B. Disponible sous : https://docs.wixstatic.com/ugd/ad6e59_ba1e4d16c64f44fa94fbd8708eae8e34.pdf
5 Banque mondiale (2017, date présumée). What a Waste 2.0: A global snapshot of solid waste management to 2050. Disponible sous : https://datatopics.worldbank.org/what-a-waste/trends_in_solid_waste_management.html
6 Ellen MacArthur Foundation (2017). One garbage truck of textiles wasted every second: report creates vision for change. Disponible sous : https://www.ellenmacarthurfoundation.org/news/one-garbage-truck-of-textiles-wasted-every-second-report-creates-vision-for-change.
7 E-Waste Monitor (2020). The Global E-waste Monitor 2020. Disponible sous : http://ewastemonitor.info/.
8 Collins, Bryony (2019). Dell Eyes $63 billion E-Waste recycling opportunity: Q&A. BNEF. Disponible sous : https://about.bnef.com/blog/dell-eyes-63-billion-e-waste-recycling-opportunity-qa/

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